19/05/06
Les priorités du Développement Durable
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A - Les principaux grands problèmes auquel le Monde est aujourd'hui confronté
Il y aura 9 milliards d'humains sur Terre avant la fin du 21ème siècle, peut-être dès 2050 :
cette perspective est inéluctable (elle est cependant nettement inférieure à ce que l'on prévoyait il y a une vingtaine d'années : 12 milliards).
Notre objectif commun, au niveau mondial comme au niveau local, doit donc être des conditions de vie acceptables pour, au moins, 9 milliards d'humains.
Or, la situation actuelle est la suivante : elle se résume en trois points :
1) Les dynamiques économiques et sociales conduisent, au sein des sociétés humaines, à de grandes disparités des ressources et des richesses.
A toutes les échelles, mondiales, nationales, locales, les écarts se creusent de plus en plus entre les plus riches et les plus pauvres. A titre d'exemples rappelons 3 chiffres :
- 25 % de la population mondiale vit encore sous le seuil de pauvreté (moins de 1 Euro par jour) ;
- près de 50 % de la population mondiale vit avec moins de 2 dollars par jour ;
- 20 % de la population mondiale consomme 87 % des richesses mondiales.
Cette dynamique n'est pas acceptable et elle est périlleuse (même si la tendance est à une lente baisse de la misère).
2) Les modes de vie actuels, ceux des plus riches mais aussi ceux imposés aux plus pauvres, déséquilibrent, dégradent et épuisent, de plus en plus et de plus en plus vite, les écosystèmes et les ressources naturelles du Monde.
En particulier, les ressources naturelles renouvelables (les sols, les eaux, les ressources biologiques, l'atmosphère ...), dont les sociétés humaines ont absolument besoin pour vivre, sont de plus en plus souvent utilisées et dégradées à des vitesses supérieures à leur renouvelabilité.
Par ailleurs, de grands systèmes mondiaux, tels les climats, les océans, les équilibres biologiques, sont, depuis quelques décennies, gravement et rapidement modifiés, en conséquence des activités humaines : beaucoup de ces modifications sont dangereuses pour la vie des sociétés humaines et ceci d'autant plus qu'elles sont très souvent difficilement prévisibles (par exemple : on sait prévoir, dans leurs grandes lignes, le réchauffement climatique et la montée des océans ; mais ne sait pas prévoir les tempêtes, les canicules, les aridifications ... dont les conséquences sont souvent catastrophiques).
Au total, on peut affirmer que cette dynamique de déséquilibres, de dégradations, de pollution, d'épuisements des milieux et des ressources naturelles, conduit l'ensemble du Monde dans de nombreuses impasses, et ceci à très brève échéance. Et, dans l'immédiat, ce sont les plus pauvres qui en sont les principales victimes.
3) Les déséquilibres sociaux et économiques, ainsi que les dégradations des ressources renouvelables vitales, sont sources de violences de plus en plus graves :
- violences quotidiennes des riches contre les pauvres,
- révoltes des pauvres contre les riches,
- montée des intégrismes religieux,
- montée des dictatures ...
- guerres ...
B - Il est donc clair que l'on ne peut pas continuer comme cela : il faut faire autrement
Les 3 objectifs à se donner doivent être :
- 9 à 10 milliards d'humains,
- ayant tous accès, de façon durable, à un minimum vital confortable : minimum matériel (économique et social), mais aussi écologique, politique et culturel ; chacun a le droit à un minimum vital, non seulement dans les domaines de l'alimentation, de l'habillement, du logement, de l'énergie, de la santé, de l'environnement … mais aussi dans les domaines de l'éducation, de la culture… de la liberté, des droits humains ;
- ce minimum vital devant être en grande partie fondé sur l'utilisation des ressources naturelles locales au rythme de leur renouvellement permanent.
Tels sont, d'une façon très résumée, les objectifs de ce que l'on appelle aujourd'hui le Développement Durable.
Nous savons aujourd'hui avec certitude que le Monde ne va pas dans ce sens.
En fait, pour réussir il faut :
- moins de consommation, moins de gaspillages matériels par les plus riches : certains parlent de décroissance ;
- mais plus de richesses, plus d'accès aux ressources naturelles renouvelables, pour les plus pauvres ;
- le tout dans la diversité des milieux naturels et des cultures humaines : il n'y a pas un seul modèle de développement durable, mais une grande diversité fonction des relations existantes et à venir entre les milieux naturels et les sociétés humaines.
Au total, il faut rééquilibrer, réajuster :
- rééquilibrer les consommations de chacun, les uns par rapport aux autres ;
- réajuster les consommations de tous en fonction de la renouvelabilité des ressources ;
- mais aussi rechercher des ressources nouvelles à mettre au service de l'amélioration des conditions de vie de chacun et de tous.
Si on ne fait pas cela, on court à l'affrontement violent à toutes les échelles du monde.
C - Mais comment faire pour changer le cours des choses ?
C'est la question principale.
Aujourd'hui, le Monde est mené, de plus en plus, par des grands ensembles financiers, dont le seul but est de gagner beaucoup d'argent, à court terme : ces ensembles financiers exploitent les ressources naturelles et les hommes, au bénéfice de quelques uns qui accumulent, légalement et illégalement, des fortunes considérables. C'est le libéralisme économique, dont on peut dire que les préoccupations sociales et écologiques sont marginales.
Ce qui est particulièrement grave, c'est que ces ensembles financiers sont, aujourd'hui, nettement plus puissants que la plupart des Etats, des Pouvoirs publics, qui leur abandonnent de plus en plus leurs responsabilités économiques et sociales : dans beaucoup de pays et de régions du Monde, développés et en développement, les politiques sociales, les politiques salariales, les politiques sanitaires, les politiques concernant la gestion des ressources naturelles ... sont de plus en plus imposées, décidées, menées par ce que l'on appelle les multinationales ; les Etats abandonnent leurs responsabilités économiques et sociales, ce qui veut dire que les peuples, qui en principe élisent les dirigeants des Etats, sont de plus en plus déresponsabilisés.
On peut dire que la démocratie dominante est de plus en plus celle des actionnaires, de moins en moins celle des citoyens (une remarque : une partie non négligeable des actionnaires des multinationales qui mènent le Monde sont des gens modestes qui y ont placé leurs économies et leurs fonds retraite ... ; cela mérite réflexion ...)
Donc, si on veut changer le cours des choses il faut changer les responsabilités.
Alors comment faire ?
Pour espérer atteindre les objectifs du Développement Durable, il faut d'urgence se donner les moyens d'adopter deux démarches fondamentales :
1 - La démarche qui consiste à rendre aux citoyens leurs responsabilités
Ceci exige un fantastique effort d'information et d'éducation des citoyens, concernant :
- la situation mondiale,
- les responsabilités individuelles et collectives de chacun,
- les voies du Développement Durable (sociales, économiques, environnementales, culturelles, démocratiques) .
Cela exige aussi que la Société Civile soit organisée et dynamique : associations, syndicats, coopératives ...
2 - La démarche qui consiste à redonner force de gestion aux pouvoirs publics
Il s'agit de redonner force aux élus et aux services publics :
- à condition bien sûr que les élus l'aient été par des citoyens formés et informés, donc responsables ;
- à condition aussi que les fonctionnaires soient compétents ;
- à condition enfin que l'exercice de la démocratie ne se réduise pas aux temps des élections : la démocratie participative doit accompagner la démocratie élective.
Ceci doit se faire à tous les niveaux d'organisations et de responsabilités : Communes, Régions, Etats, Organisations Internationales.
En résumé, c'est aux Pouvoirs Publics, démocratiquement élus et accompagnés par les citoyens instruits et responsabilisés, de reprendre le pouvoir volé par les grandes entreprises privées et d'assurer les diverses voies du Développement Durable.
Tactiquement, il est bon de développer, en priorité, ces prises de responsabilités par les citoyens et par les pouvoirs publics, au niveau des organisations territoriales qui sont les plus proches des citoyens, qui sont les plus accessibles : les Municipalités et les Régions. C'est en particulier à ce niveau que les citoyens peuvent être le plus facilement conscientisés et mobilisés, à partir de situations et de problèmes concrets. Cependant, les cadres nationaux et internationaux sont indispensables : il faut continuer à se battre pour les définir et les mettre en place. Dans ce domaine, il ne faut pas sous-estimer le travail déjà réalisé depuis les années 70 : Conférences de Stockolm, Rio et autres, Forum sociaux. On a, probablement, plus avancé au niveau mondial qu'au niveau local.
Il ne faut pas sous-estimer les difficultés, les obstacles, qui sont considérables car on s'attaque, à la fois, à nombre de privilèges des plus riches et à nombre d'ignorances et d'attitudes de soumission des plus démunis. En effet, ce que l'on doit faire et affronter est considérable :
- réussir l'éducation, la formation, l'information : chaque citoyen doit recevoir les
moyens de comprendre les situations et d'agir à son niveau ;
- mettre en place à la fois la démocratie participative et des pouvoirs publics efficaces ;
les résistances seront nombreuses ;
- contrôler l'économie de marché, très destructrice des ressources naturelles ; là aussi, les résistances seront nombreuses ;
- lutter contre la corruption ;
- convaincre les plus riches (les pays, les individus, les entreprises) d'être moins gourmands : comment recommander, voire imposer un maximum vital ?
- soutenir les plus pauvres, sans tomber dans l'assistanat permanent, donc assurer l'emploi permettant le minimum vital ;
- s'attaquer à toutes les modifications indispensables du fonctionnement des sociétés modernes qui consomment au-delà des ressources disponibles : les transports, l'énergie, l'occupation des sols, les déchets, les pollutions, ... ; il s'agit, en particulier, de réduire les gaspillages, de sols, d'eaux, d'écosystèmes ... et de réduire les destructions de ces ressources renouvelables ; mais il faut aussi rechercher de nouvelles ressources (pour l'énergie, pour l'alimentation ...) et rechercher de nouvelles démarches de gestion des ressources existantes.
Alors Développement Durable et/ou décroissance ?
Décroissance des consommations des plus riches : oui, sans aucun doute. Décroissance des déséquilibres économiques et sociaux : également oui. Décroissance des gaspillages : encore oui.
Mais pour la majorité du Monde, le Développement Durable, fondé sur la renouvelabilité des ressources naturelles et sur le fonctionnement démocratique des sociétés, ne se fera pas sans la croissance des consommations qui sont nécessaires, indispensables, aux plus pauvres.
La marge de manoeuvre se situe donc, pour l'essentiel, dans la capacité des sociétés :
- d'une part à faire les bons choix politiques ;
- d'autre part à gérer les ressources renouvelables, existantes et à venir.